9. Convaincre et diffuser
Il ne suffit pas de savoir faire de l’écoconception en tant que designer pour pouvoir écoconcevoir des services numériques. En effet, le designer est amené à réaliser ces services en collaboration avec d’autres métiers tels que le chef de projet, le développeur, le responsable Marketing…
a. Mobiliser ses collègues
Dans les faits, les designers sensibilisés à la conception numérique responsable doivent souvent commencer par répandre la bonne parole de l’écoconception au sein de leur propre équipe de designers.
Cela peut passer par la création d’un support interne qui a vocation à :
- Sensibiliser : rappeler les chiffres clés de l’impact environnemental du numérique et en quoi consiste l’écoconception. Les premiers chapitres de ce guide devraient pouvoir vous aider à rassembler la matière nécessaire.
- Lister l’ensemble des outils pouvant être mis à disposition de l’équipe pour comprendre, animer, évaluer et réaliser des projets : outils et “toolkits” open source, wiki, sites web, référentiels de bonnes pratiques, plugin, outils de diagnostique…
- Lister les formations disponibles, que ce soit les MOOCs gratuits, les certifications ou bien les formations internes propres à votre société.
Il est aussi possible dans un second temps de :
- Proposer une méthodologie d’accompagnement projet : réfléchir à l’intégration concrète de cette notion d’écoconception dans les trames d’ateliers de cadrage, lors de la phase de recherche utilisateurs, lors des ateliers d’idéation, de priorisation, la mise en oeuvre des bonnes pratiques de ce guide lors des phases de prototypage et d’UI design, les outils pour auditer un site existant, mais aussi l’incidence sur la phase de tests utilisateurs
- Se fixer pour objectif d’introduire la notion d’écoconception dans chaque projet (interne ou externe) et d’évaluer l’atteinte de cet objectif grâce à une échelle. Par exemple :
- Niveau 1 - “le sujet de l’écoconception a été abordé mais sans suite”
- Niveau 2 - “le sujet de l’écoconception a été abordé et quelques “quickwins” ont été mis en place”.
- Niveau 3 - “Un premier projet pilote a été réalisé en écoconception”
- Niveau 4 - …
- Inscrire son équipe à des ateliers comme la Fresque du Climat ou la Fresque du Numérique qui suscitent une prise de conscience collective et permettent de prendre un peu de hauteur sur nos métiers.
De la même façon que nombre designers doivent faire de la pédagogie autour d’eux sur ce en quoi consiste leur discipline, il sera nécessaire, dans la majorité des cas, d’expliquer autour de soi les enjeux de l’écoconception pour convaincre les différentes parties prenantes de son importance.
b. Convaincre les décisionnaires
Pour atteindre des objectifs plus ambitieux ou obtenir du budget pour financer des initiatives, il va être nécessaire de convaincre les personnes décisionnaires (clients, managers, chefs de projet, direction…).
Pour cela, voici une liste d'arguments qui pourront les toucher. L’écoconception entraîne en effet un certain nombre de conséquences positives (liste non exhaustive), elles-mêmes touchant aux différents aspects du design (écologie/soutenabilité, expérience utilisateur et rentabilité financière).
Bénéfice | Soutenabilité | Expérience utilisateur | Rentabilité financière |
---|---|---|---|
Réduction de l’obsolescence des terminaux | Oui | Oui | ? |
Préservation de la batterie | Oui | Oui | ? |
Réduction de la consommation des données mobiles | Oui | Oui | ? |
Protection des données personnelles | Oui | Oui | ? |
Rapidité de chargement | Oui | Oui | Oui (diminution du taux de rebond) |
Optimisation du référencement | Oui | Oui | Oui |
Meilleure accessibilité | Oui | Oui | Oui (augmentation de l’audience) |
Tous les arguments sont-ils bons pour convaincre ?
Nous recommandons d’utiliser de préférence les arguments concernant la soutenabilité et l’expérience utilisateur. En effet, certains interlocuteurs peuvent être plus sensibles aux arguments financiers : ne nous privons pas de les utiliser. Le design doit après tout également viser la viabilité économique. Attention cependant : si les motivations principales sont d'ordre financier, il sera difficile de communiquer sur la démarche sans risquer de faire de l'éco-blanchiment (voir Communiquer sans tomber dans le Greenwashing).
Zoom sur le référencement
Ce n’est pas forcément à l’argument du meilleur référencement que l’on pense en premier lorsque l’on cherche à convaincre ses équipes. Il n’est pourtant pas à écarter !
Notons que le moteur de recherche Google favorise les sites :
- les plus légers et les mieux optimisés
- les mieux “responsive” (préconisation du mobile-first)
- les PWA (Privilégier les App Web)
- les contenus les mieux structurés, les textes les plus clairs.
En somme, les sites écoconçus.
Zoom sur l'accessibilité
Le lien entre écoconception et amélioration de l'accessibilité d'un site n'est pas évident a fortiori. Pourtant, beaucoup de bonnes pratiques d'accessibilité améliorent l'écoconception d'un service et vice-versa !
Quelques exemples :
- Proposer un contenu structuré, clair et concis (hiérarchie de titres, listes à puces, cohérence…)
- Éliminer ce qui n'est pas essentiel, les fioritures
- Limiter l'usage de la vidéo
- Bannir l'auto-play
- Concevoir en mobile-first
- Mettre un texte alternatif aux images (afin d'être mieux référencé et de réduire la durée de parcours des utilisateurs)
- Être robuste : optimiser la compatibilité avec les logiciels et usages futurs (principe 4 de l'accessibilité)
c. Contre-argumenter
Au-delà des arguments pour convaincre, il est également nécessaire d'être armé pour savoir répondre à certains contre-arguments de personnes réfractaires à l'écoconception.
Graphisme : "Le site va être moche"
L’un des contre-arguments que l’on entend souvent lorsqu’il s’agit d’écoconception, est l’idée que le site sera “moche”, peu attractif, ennuyeux, et donc que les clients et utilisateurs en seront moins satisfaits.
Certains sites écoconçus (comme le nôtre) ont adopté un parti pris délibéré de simplicité et de sobriété qui est souvent la marque de fabrique des sites “low-tech”.
En revanche, il est tout à fait possible, si on le souhaite, d’avoir un site écoconçu qui soit coloré, et agrémenté d’illustrations et de photos (optimisées) qui auront été choisies avec soin.
En voici quelques exemples. Cette liste est bien sûr non exhaustive ! Pour plus d’exemples, allez voir “Exemples de sites écoconçus”.
Usage des couleurs
Le site Sustainable Web Design fait la part belle aux couleurs que l’on retrouve tout au long du parcours sur le site.
Usage des illustrations
La Coopérative des Internets utilise de belles illustrations.
Usage des photos
Le site du restaurant Brawcoli est illustré de quelques jolies photos de plats.
À l’inverse, un site au design “sobre” ne signifie pas pour autant qu’il est écoconçu !
Coût : "Ça va me coûter cher"
Lors de sa mise en place, l'écoconception peut diminuer la vélocité de l'équipe. De la même manière que pour l'accessibilité, il y a une montée en compétences à effectuer. Mais une fois les bons réflexes acquis, l’écoconception ne prend pas plus de temps aux équipes.
L'écoconception peut même générer des retombées commerciales positives et des économies, notamment via les leviers suivants :
- Élargissement de la cible : qu'ils soient en 3G ou avec un mauvais wifi, qu'ils comptent chaque donnée parce qu'ils ont un forfait international ou qu'ils soient dans le TER, vos utilisateurs pourront accéder bien plus rapidement à votre site (voire y accéder tout court !). De plus, l'écoconception améliore l'accessibilité (voir la section dédiée à ce sujet) pour les personnes en situation de handicap. Votre site, s'il n'est pas déjà accessible, pourra ainsi toucher de nouvelles personnes.
- Meilleur référencement (voir la section dédiée à ce sujet)
- Amélioration de l'expérience utilisateur et du taux de conversion : les utilisateurs accèdent plus rapidement au service, diminuant ainsi le taux de rebond, leurs données sont mieux protégées grâce à la réduction du nombre de services tiers, leur parcours est plus court et plus fluide ce qui améliore leur satisfaction et augmente le taux de conversion.
- Meilleure image de marque : un site léger entre en cohérence avec la politique de responsabilité sociétale de l'entreprise, particulièrement si son positionnement est en lien avec l'environnement. Par ailleurs, il est possible de documenter et partager sa démarche d'écoconception ce qui peut contribuer au rayonnement de l'organisation (voir Communiquer sans tomber dans le Greenwashing).
- Économies d'infrastructure : le fait de réduire le nombre de pages du site, de bien compresser les contenus ou encore de supprimer d'éventuels services tiers superflus permet de générer des économies en matière d'hébergement et d'abonnements. Pour les organisations du secteur public ou faisant plus de 250 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel risquant une amende en cas de non-respect du règlement en matière d'accessibilité numérique, l'écoconception peut être un premier pas vers la conformité légale. Enfin une politique d'écoconception s'accompagne généralement d'une politique d'achat de matériel informatique responsable, consistant par exemple à conserver plus longtemps ses appareils ce qui génère également des économies.
- Retour sur investissement à moyen terme : Si la refonte d'un service en écoconception peut être coûteuse et nécessiter de recourir à des compétences externes au démarrage, une fois l'équipe formée et les préoccupations environnementales intégrées à chaque étape du développement du service numérique, cela ne coûtera pas plus cher qu'auparavant. L'écoconception ayant à l'esprit l'utilisation pérenne du service, une bonne conception et un bon développement soucieux des normes de qualité et de performance web pourront même durer ou s'adapter plus facilement aux évolutions du service dans les années à venir, évitant de le refondre en totalité ou partiellement tous les 2 ou 4 ans. L'écoconception permet aussi d'éviter un risque légal de sanction financière qui pourrait advenir d'ici 5 ans (voir partie ci-dessous).
Légal : “De toute façon, il n’y a pas de loi. Je ne risque rien.”
Contrairement à l'accessibilité, l'écoconception n'est pas une obligation légale… pour le moment. Depuis 2020, de nombreuses initiatives gouvernementales voient le jour tant à l'échelle européenne que française avec le premier vote d'une loi historique sur le sujet en novembre 2021.
France
La France est un des pays les plus en avance sur les questions de numérique écoresponsable et compte visiblement conserver son rôle de pionnière sur ce sujet comme le montrent les initiatives suivantes :
- Le 15 novembre 2021, l'Assemblée nationale a voté le projet de Loi n° 2021-1485 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France. Le périmètre finalement retenu n'est pas aussi ambitieux et contraignant que ce qu'avait proposé le Sénat initialement mais présage des lois probables à venir.
- L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) est désormais chargée de renforcer la régulation environnementale du numérique et de fixer les modalités d’application de cette loi (par exemple, établir un référentiel d’écoconception incluant certains critères tels que l’interdiction de la lecture automatique des vidéos ou le scroll infini sur les sites web, voir article 25, section 3 de la loi).
- L'Agence Française de la NORmalisation (AFNOR) a initié mi-2021 la rédaction d'une AFNOR Spec sur l'écoconception de services numériques. Elle aura vocation à être portée auprès de l'Union Européenne.
- La Direction Interministérielle du Numérique (Dinum) s'empare fortement du sujet de l'écoconception de services numériques avec notamment la publication du Règlement Général d'Écoconception de Services Numériques (RGESN) dans le cadre de la mission interministérielle "Green Tech" avec le concours du Ministère de la Transition Écologique, de l'Agence De l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (ADEME) et de l'Institut du Numérique Responsable (INR).
- Design Gouv a lancé le 16 décembre 2021 une formation gratuite à l'écoconception.
- Le Conseil National du Numérique (CNNum) a proposé, en 2020, 50 mesures pour un agenda national et européen sur un numérique responsable, "c’est-à-dire sobre et au service de la transition écologique et solidaire".
L'écoconception de services numériques est donc un sujet d'actualité pour les administrations publiques concernées.
Union Européenne
À l'échelle européenne aussi, les acteurs publics se mettent en mouvement. En mars 2020, l'Allemagne a publié un agenda pour un numérique écologique en 70 mesures (source p25 : Feuille de route sur l'environnement et le numérique - PDF). La France et l'Allemagne pourraient continuer de vouloir pousser le sujet du numérique écoresponsable à l'échelle de l'UE.
Le groupe parlementaire européen des Verts/ALE a mandaté une étude sortie en décembre 2021 : Le numérique en Europe : une approche des impacts environnementaux par l’analyse du cycle de vie.
En somme, l'écoconception de services numériques n'est pas une obligation légale mais de nombreux projets de lois et publications montrent qu'elle pourrait le devenir dans les années à venir.
Pour aller plus loin :
- Loi du 15 novembre 2021 - Viepublique.fr
- Analyse de la loi par GreenIT
Social : "Le social passe d'abord"
Les enjeux sociaux et environnementaux ne sont pas antinomiques, bien au contraire.
- L'écoconception contribue à une meilleure accessibilité (voir la section Zoom sur l'accessibilité).
- Écoconcevoir un service numérique, c'est le rendre plus accessible aux personnes subissant la fracture du numérique : illectronisme, faible couverture internet, appareils anciens, forfaits limités en données… Les services écoconçus ne nécessitent pas la dernière génération de smartphone, de système d'exploitation ou de navigateur pour fonctionner, ni une connexion haut débit pour y accéder.
- Écoconcevoir, c'est aussi faire durer notre matériel plus longtemps, et réduire par conséquent notre consommation en ressources abiotiques. Or les conditions d'extraction des métaux sont souvent catastrophiques. Quelques exemples (source : ADEME, PDF) :
- Selon l'UNICEF, plus de 40 000 enfants travailleraient dans les mines de cobalt et de coltan du Sud de la République Démocratique du Congo.
- En Chine, dans la région de Baotou, les exploitations de néodyme rejettent des déchets chargés en radioactivité et ont entraîné des taux de mort par cancer s'élevant à 71% en 2006.
- Au Chili, en Argentine, en Bolivie, l'utilisation massive d'eau pour la production de lithium provoque des conflits d'usages avec les populations locales, au point de compromettre leur survie.
Il est urgent de réduire notre consommation de métaux. En allongeant leur durée d’utilisation, nous pouvons diminuer les impacts sur les populations les subissant en première ligne.
L'écoconception n'a pas de sens si elle n'est pas accompagnée d'une démarche éthique sur le plan du modèle économique, de l'inclusion ou encore des données personnelles. Il convient de l'inclure dans une démarche globale de soutenabilité.
d. Sensibiliser les utilisateurs
Votre client a été convaincu par vos arguments et a accepté que vous et vos collègues formés sur ces questions éco-conçoivent son site. Quid désormais des utilisateurs ? Un site ou encore une application peuvent être de formidables vecteurs de sensibilisation des usagers. Sans tomber dans la culpabilisation, ni dans la sur-responsabilisation des individus par rapport aux entreprises et à l'Etat quant aux problématiques environnementales, il s'agit de saisir une opportunité de faire de la pédagogie.
En effet, une enquête de mai 2019 révélait que seuls 27% des Français se sentaient bien informés concernant l'impact du numérique sur l'environnement (source : BVA Group et Digital Society Forum). Les mesures prioritaires à mettre en place selon les Français (à 50%) étaient "sensibiliser le grand public sur l’impact de leurs habitudes numériques sur l’environnement" et "mobiliser les acteurs du numérique pour qu’ils sensibilisent les consommateurs à une utilisation « écoresponsable » de leurs produits".
Bien que ces chiffres aient pu évoluer depuis, une grande partie des utilisateurs n'est probablement pas encore informée sur ces questions. Il existe différentes façons de capitaliser sur son service pour faire de la pédagogie mais le ressort essentiel consiste à communiquer une information sur l'impact environnemental et rediriger vers une explication détaillée si l'utilisateur souhaite en savoir plus.
Critère 4.12 du RGESN
Indiquer à l’utilisateur lorsque l’utilisation d’une fonctionnalité a des impacts environnementaux importants permet de valider le critère 4.12 du référentiel général de l'écoconception des services numériques.
Voir le référentiel
Exemples d'information sur l'impact environnemental à afficher :
- Ordres de grandeur d’impacts entre différents canaux (résolution de vidéo, mode de livraison…)
- Équivalent du poids de la page en grammes équivalent CO2
- Note de la page via EcoIndex
- Performance par rapport au reste du web ou par rapport à d'autres sites équivalents
- Mesure et équivalence de l'impact évité grâce à ses usages raisonnés par rapport à la moyenne
- Texte explicatif concernant le graphisme inhabituel ou expliquant certains choix de conception
- Rappel que c'est lors de la fabrication du matériel que se concentre le plus gros de l’impact
Autres informations proposées par la MiNum_Eco dans le cadre d’une déclaration d’écoconception :
- Versions logicielles du terminal utilisateur supporté (navigateur, système d’exploitation, etc.). Exemple : "iOS 11 minimum, Android année 2015 minimum..."
- Type, année de construction ou versions cibles des équipements utilisateurs supportés (type de smartphone, taille écran, etc.). Exemple : "iPhone 5 / Samsung Galaxy S3 minimum" ou bien "Tout équipement mobile datant de 2014 minimum".
- Connexion minimum pour accéder au service. Exemple : "2G en mobile / 512 Kbs en connexion fixe".
- Adaptation à différentes tailles d’écran : oui / non. Si oui, indiquer la taille minimum de l’écran.
- Stratégie mise en œuvre et objectifs en matière de réduction ou de limitation des impacts environnementaux : indiquer les actions mises en œuvre pour réduire la consommation de ressources, par exemple le nombre de requêtes serveurs maximum, le poids des ressources par écran ou pour un parcours utilisateur donné.
- Date de publication ou de mise à jour de cette déclaration.
Critère 4.15 du RGESN
Fournir à l’utilisateur un moyen de contrôle sur ses usages afin de suivre et de réduire ses impacts environnementaux permet de valider le critère 4.15 du référentiel général de l'écoconception des services numériques.
Voir le référentiel
Pour aller plus loin :
Affichage de l'impact environnemental du mode de livraison
Le site d'Orange propose différents modes de livraison en indiquant lesquels sont les plus impactants pour l'environnement.
Affichage des équivalents CO2 et eau
Kaïros présente en bas de son site deux indicateurs environnementaux différents pour son site. L’indication des équivalences doit être accompagnée d’une explication sur le calcul.
Affichage de la note Ecoindex
En 2021, Dalkia a refondu son site en écoconception. La note écoindex de chaque page est visible sur la droite. Elle renvoie vers une page explicative détaillant les méthodes de mesure.
Ces exemples sont des idées de ce qui existe déjà et peuvent être des sources d’inspirations. Cependant, il est important de rappeler que ces scores font du sens s’ils sont contextualisés par rapport au parcours utilisateur et à l’unité fonctionnelle. Par exemple, quel est le score moyen pour un parcours donné ?
Exemples de contenus vers lesquels rediriger :
- Article expliquant les choix visuels et de fonctionnalités effectués (exemples donnés dans la section Communiquer sans tomber dans le greenwashing)
- Info-bulle qui explique ce que signifient les chiffres et comment ils sont calculés
Points de vigilance sur l'affichage de ces ressorts pédagogiques :
- Les informations doivent rester discrètes pour ne pas gêner l'utilisateur, ni détériorer l'accessibilité du site.
- Le site doit être correctement écoconçu.
- S'assurer que le modèle économique de l'entreprise n'est pas en contradiction avec la responsabilisation de ses utilisateurs. Par exemple, un constructeur automobile, dont l'essentiel de l'impact se situe lors de la production des véhicules et de leur utilisation, n'aurait pas de légitimité à responsabiliser ses utilisateurs dans leur usage du comparateur de voitures présent sur le site. En effet, cet impact est insignifiant en comparaison de l'impact environnemental global de l'entreprise et de ses produits. NB : cela ne signifie pas qu'il ne faut pas écoconcevoir le site pour autant.
e. Communiquer sans tomber dans le Greenwashing
L'intérêt de communiquer
La communication est importante pour les entreprises : elle permet de construire son image de marque, d'être attractive pour les candidats et désirable pour les clients, et de vendre ses prestations à son juste prix. Il est donc normal qu'elles aient envie de communiquer sur ce qu'elles font en matière d'écoconception.
Par ailleurs, la communication sur les aspects environnementaux de son service (dimension de ce qui est appelé "eco-branding") peut être utile pour générer de l’adhésion auprès des décisionnaires comme des utilisateurs. Il ne suffit pas alors d’employer les bons arguments. Il est nécessaire de créer un produit désirable par sa forme comme par son fond. En rendant désirables des modes de vie plus respectueux de l'environnement, on accélère le changement des habitudes des usagers.
C’est là où la communication et le marketing peuvent contribuer : un site minimaliste, une image de marque visuellement véhiculée, des informations percutantes concourant à la pédagogie auprès des utilisateurs sont autant de moyens louables pour susciter le désir pour le service.
Le risque de greenwashing
L’éco-branding n’est pas un levier à négliger mais doit bien arriver comme renfort et moyen d’atteindre le but environnemental cherché, et non coûter plus sur le plan environnemental que l’absence de communication ou viser à tromper les utilisateurs en leur faisant croire que l’entreprise fait beaucoup plus qu’en réalité.
Sinon il y a un risque de tomber dans le greenwashing. Le "greenwashing" ou "écoblanchiment" consiste à redorer son image de marque en se faisant passer pour beaucoup plus écoresponsable qu'en réalité (notamment par l'usage de la couleur verte dans son logo et ses communications) et par la mise en avant d'actions superficielles. Par exemple, McDonald's a passé le fond de son logo en vert dès 2007, uniquement en Europe.
Nous estimons que la communication et le marketing doivent venir en soutien de la démarche d’écoconception, après, et non avant, que l’essentiel ait été fait. Il s’agit de communiquer sur des actes significativement importants, et non de se vanter bruyamment d’un acte insignifiant par rapport aux impacts environnementaux globaux du service ou de l’entreprise.
Par exemple, Volkswagen a fait un site web “écoconçu”. Nous pensons qu’il est généralement louable que toute entreprise, peu importe son modèle économique, tente de réduire son impact environnemental numérique. Cependant, dans le cas de Volkswagen, les gains générés par leur site internet sont négligeables par rapport à ceux générés par le parc automobile que l’entreprise produit. On peut alors parler ici de greenwashing : on donne l’impression d’être une entreprise écologique alors que l’on construit et vend des produits hautement polluants sans prendre d'actions fortes sur l'essentiel de son impact.
Nos préconisations
Mais alors comment communiquer ? Pour éviter d'être accusé de greenwashing, nous recommandons de respecter le cadre suivant :
- Écoconcevoir de manière rigoureuse : en s'attaquant aux plus gros leviers d'impact en parallèle des "quick wins".
- Évaluer correctement : Ne pas se contenter d'une bonne note ecometer sur ses pages mais bien mesurer le parcours et retirer le superflu.
- Mettre en place une démarche globale de numérique responsable, incluant notamment la politique d'achats mais aussi l'accessibilité.
- Expliquer sa démarche avec sincérité : arbitrages effectués, reste à faire, initiatives mises en place pour y parvenir (à la façon d'une page Accessibilité).
- Être précis dans ses explications : détailler ses méthodes de mesure et leurs limites.
- Afficher cette démarche avec discrétion et humilité : ce n'est jamais parfait et cela ne justifie pas un rebranding. Ne pas repeindre le site en vert avec des petites feuilles.
Si vous n'êtes pas sûr de pouvoir communiquer sans risque de mauvaise publicité, il est aussi possible d'écoconcevoir sans communiquer.
Exemples d'explications de démarche d'écoconception de site web :
- Low-Tech Lab : Faire un site low-tech ?
- Dalkia
(pour plus d'exemples de sites écoconçus, voir les ressources).
Pour aller plus loin :
- Guide anti-greenwashing de l'ADEME (PDF)
- Communication responsable - ADEME
Il serait très tentant et pratique de pouvoir communiquer sur sa démarche en affichant un label de site écoconçu. Mais à ce jour, il n'existe pas de label officiel pour l’écoconception de services numériques.
Il n'existe pas non plus de certification généralisée, parce que plusieurs problèmes se posent :
- Mesurer l'impact d'un service se fait en mesurant un parcours correspondant à l'unité fonctionnelle du service (voir Définir le besoin). Diviser une page lourde en plusieurs pages légères n'est pas de l'écoconception. Or, il n'est pas possible d'automatiser la mesure d'impact d'un parcours sans paramétrage préalable. Cela nécessite de la main d'œuvre qualifiée (donc coûteuse).
- Mesurer l'impact consiste à comparer des services ayant la même unité fonctionnelle. On ne peut pas comparer un site vitrine et un site d'e-commerce, un site de cours en ligne et un site de calcul d'itinéraire.
Avoir une échelle unique pour tous les sites web est donc complexe et limité. On ne peut pas mesurer uniquement le poids des pages sans prendre en compte le parcours réel des utilisateurs.
C'est pourquoi il n'existe pas de certification ni de label à l'heure actuelle permettant de certifier l'écoconception d'un site. Il existe cependant des notations, plus ou moins rigoureuses. Certaines comparent par exemple à une base de données riche où les sites sont classés par usage. D'autres se contentent de passer les pages à la moulinette. Il serait dommage de payer pour ce second type de label et se faire taxer de greenwashing ensuite.